Épisode #248: Physique quantique et philosophie de l’esprit

Interview: Quentin Ruyant.

2 réponses
  1. F.Brunot
    F.Brunot dit :

    Bonjour Monsieur Abrassart,

    Encore une interview très enrichissante, merci.

    Je pense que face à la conscience, je suis semblable à un citadin face à une forêt vierge : si l’on me demande ce que je vois en regardant la forêt, je répondrai « des arbres ».
    Si la même question était posée à un spécialiste de cette forêt ou un être humain y passant sa vie et dont l’existence dépendrait de cette forêt, les mots utilisés pour la décrire se multiplieraient.

    Peut-être que j’appelle « conscience » des sensations semblant proches mais qui ne le sont pas. Conscience d’être debout, conscience d’avoir un goût amer dans la bouche, conscience d’être éveillé, conscience de voir une forme géométrique, ne semblent pas identiques : ce sont quatre « types » d’arbres différents mais j’appelle « arbre » chacun d’entre eux.

    D’un point de vue réductionniste et mécaniste, les états physiologiques induits par ces stimuli internes ou externes pourraient générer une activité physiologique présentant des similitudes. Similitudes qui pourraient être discriminées par les réseaux de neurones impliqués dans la production du langage. Discrimination qui pourrait être modifiée par l’apprentissage.

    A l’image de Dan Dennett, évoqué dans l’interview, je ne défend pas l’existence d’un « problème difficile ». La conscience (ou « les consciences ») seraient de simples sensations mentales, résultant d’un ensemble d’états physiologiques, étiquetés comme « conscience » par les réseaux de neurones « langagiers ».

    En tout cas, merci d’avoir permis à un point de vue minoritaire de pouvoir s’exprimer dans l’interview.

    Pour en revenir aux effets macroscopiques de la physique quantique, pourquoi ne pas considérer l’univers entier comme le résultat émergent de l’activité d’un champ quantique ? Ça n’est pas un point de vue minoritaire (Giacomo Mauro D’Ariano, « L’Univers est-il un ordinateur quantique ? », La Recherche, n° 489, juillet-août 2014, p. 48-51). Quantique ne rimerait donc pas uniquement avec « microscopique ».

    Merci et bravo pour ce podcast.

    Bonne continuation.

    Cordialement.

    F.B.

  2. Quentin Ruyant
    Quentin Ruyant dit :

    Je viens de voir ce commentaire, étant la personne interviewée dans ce podcast je me permet d’y répondre…

    Si je vous interprète correctement, vous parlez de la conscience comme simple étiquetage, dans le sens où le terme n’aurait pas de réel référent dans le monde (au delà d’un air de famille) et évoquez à ce titre plusieurs types de « sensations mentales » (visuelles, gustatives). Ceci dit le fait que nos sensations soient diverses n’empêche pas qu’il s’agisse toujours de « sensations mentales » et qu’on puisse s’intéresser à cet aspect en faisant abstraction du contenu. De même il me semble que le concept d’arbre (ou a minima celui d’organisme vivant) est prérequis si l’on prétend différencier, en tant qu’expert, des espèces d’arbres.

    Peut-être voulez-vous dire que le terme de « conscience » ne concerne pas uniquement de pures sensations mais parfois par exemple un contenu propositionnel, comme « être debout » ou « être une forme géométrique » et donc ce serait une erreur de rassembler ces choses sous un même type. Dans ce cas on est plutôt d’accord, mais ceux qui, comme Chalmers, parlent de problème difficile ne vont pas forcément nier que le terme de « conscience » soit polysémique, ils vont invoquer une signification particulière du terme qui est « l’aspect phénoménal » ou « qualitatif » de l’expérience, un aspect « à la première personne » intransmissible à quelqu’un d’autre, le « ce que cela fait » (encore une fois, abstraction faite du contenu), et ils prétendent que c’est un aspect réel de nos expériences dont il convient de rendre compte, là où d’autres, comme Dennett, vont tenter je crois de réduire la conscience à des aspects propositionnels uniquement, descriptibles en « troisième personne ». Il s’agit donc de quelque chose d’assez précis, je ne pense pas qu’on puisse parler de polysémie.

    Pour ce qui concerne la physique quantique, en effet il n’y a rien de controversé à penser que l’univers est le résultat émergent de champs quantiques. La question sera plutôt : est-ce pertinent pour la conscience, doit-on prendre en compte des aspects quantiques pour l’expliquer ou peut-on se contenter de formuler le problème de la conscience dans le cadre d’une approximation classique ?
    La plupart des philosophes de l’esprit pensent que les effets quantiques ne sont pas pertinents, ou qu’on peut en rester à une conception de surface de ce qu’est la matière pour poser le problème sans entrer dans les détails de la physique. C’est ce type de vue que j’attaque.

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