Épisode #253: La zététique version Broch

Jean-Michel Abrassart de la zététique version Broch.

 

 

 

Ceci est la transcription de l’épisode #253: La zététique version Broch du balado Scepticisme scientifique. Un tout grand merci à Jérôme pour avoir réalisé cette transcription.

Aujourd’hui j’ai décidé de vous parler un peu d’Henri Broch et de la Zététique version Broch. La raison pour laquelle j’ai décidé de le faire, c’est clair, ce n’est pas un secret que je ne suis pas un très grand fan d’Henri Broch, c’est un sujet que j’ai tendance à éviter dans le podcast ou sur mon blog, mais j’ai eu récemment des discussions sur Twitter ou aussi en face à face avec pas mal de gens… Bon, à un certain moment je pense que je dois en parler clairement sur le podcast plutôt que de tourner autour du pot. Alors c’est vrai que c’est un peu un sujet qui fâche surtout forcément du coté français parce qu’il y a un aspect très émotionnel connecté à cela, si on est devenu un sceptique ou un zététicien en lisant Broch on peut avoir un attachement émotionnel. Après c’est toujours la question de la critique en interne au mouvement, en principe on est tous pour dire : « Oui on doit pouvoir se critiquer les uns les autres », et en pratique quand on le fait ça se passe généralement mal parce qu’on est des êtres humains comme tous les autres.
Ceci étant dit, j’avais juste envie de mettre un peu à plat certaines choses qui font que je ne suis pas un très grand fan d’Henri Broch en essayant de les expliquer le plus calmement et le plus simplement possible. Evidemment ça n’engage que moi, ça n’engage absolument pas ni Nicolas Gauvrit ni Thomas Guiot ni n’importe quelle autre personne avec qui j’ai travaillé sur ce podcast.
Pour revenir un peu en arrière, j’ai découvert la zététique version Broch durant mes études universitaires et de manière assez parlante, j’avais lu son ouvrage « Le paranormal » qui était sorti à l’époque mais qui ne m’avait pas convaincu. C’est pour ça que je ne suis pas devenu un sceptique ou un zététicien via Broch, mais plutôt en interagissant sur Internet avec Eric Maillot qui a probablement été le premier à m’initier au scepticisme puis Jacques Scornaux, enfin ce sont tous les ufosceptiques dont je vous parle qui m’ont plus convaincu de l’intérêt de la démarche sceptique, et quand je suis allé aux Etats-Unis, là j’ai découvert Skeptical Inquirer, le Skeptic Magazine, etc. Et donc c’est plutôt à ce moment-là que j’ai commencé à me dire sceptique. Un aspect important qui va revenir dans cette discussion est que moi ce qui m’a toujours intéressé c’est l’étude scientifique du paranormal, sur le phénomène ovni ou le reste, mais je vais aborder avec vous aujourd’hui les points qui me dérangent à propos de Broch, et j’envisagerai certains contre arguments parce que j’en ai souvent discuté avec des gens qui défendent Broch et je connais les contre arguments classiques.
Donc le premier c’est l’absence de publication scientifique.
Le deuxième c’est la nature incohérente du projet zététique.
Le troisième c’est la question de l’enseignement de la pédagogie de l’esprit critique, comment on enseigne l’esprit critique aux gens.
Le quatrième point c’est le « Prix-Défi », qu’est-ce que le Prix-Défi peut prouver ou ne pas prouver.
Le cinquième point, et là c’est plus pour révoquer un contre argument en fait, c’est ce qu’a écrit ou fait Henri Broch était valable dans les années 1980 parce que dans ces années il n’y avait que lui qui faisait ça. Donc je dirais que c’est une question de temporalité. Le contre argument qu’on m’oppose c’est toujours de dire : « Oui mais dans les années 1980, bla bla bla… »
Et puis je terminerai en disant un truc que j’aime bien chez Broch (rires), il y a quand même évidemment des tas de trucs que j’aime bien chez Broch, mais je pense qu’il ne faut quand même ne pas faire l’impasse sur le reste.
Donc le premier point c’est l’absence de publication scientifique.
A ma connaissance, bon j’ai peut-être loupé un article, mais je parle ici d’article, on va y revenir, mais la zététique on peut la voir comme deux choses : comme une pédagogie de l’esprit critique ou comme l’étude scientifique du paranormal, on en reparlera dans le second point, mais on va dire sur ces deux sujets-là : Est-ce qu’Henri Broch a publié beaucoup d’articles dans des revues scientifiques à comité de lecture ? Puisqu’en fait c’est toujours la question, on se présente comme un expert dans un domaine, donc la question c’est de savoir s’il est un expert, ce sont des sujets qu’on a couvert sur le balado, le problème c’est qu’il ne faut pas faire deux poids deux mesures, on dit : « Oui, mais tel auteur ne fait pas de publications dans les domaines sur lesquels il communique dans les médias de masse », la question se pose aussi pour les sceptiques. Dans quelle mesure les sceptiques qui s’expriment sur les sujets sont des experts eux-mêmes ? Broch, à ma connaissance a au moins publié un article qui s’appelle « Les prisons de l’esprit », de mémoire je l’ai vu dans son livre « Le paranormal », il l’a remis dans un chapitre de « Devenez sorciers devenez savants », il l’a publié dans la revue « Agone » et je crois l’avoir vu passer en anglais dans la revue Skeptical Inquirer. Donc c’est un article qu’il a vraiment bien capitalisé, je pense qu’il l’a publié au minimum trois fois dans trois endroits différents. Donc c’est un article dans lequel il se plaint que les gens croient de plus en plus au paranormal, même dans les milieux universitaires, et en fait c’est une analyse de résultats que deux autres sociologues (Daniel Boy et Guy Michelat) ont récolté, donc il a repris les données de ces sociologues et il les a ré analysé en les commentant selon l’approche classique de dire : « Les gens sont irrationnels etc… ». Donc ce ne sont pas des données qu’il a récolté lui-même, il a refait des analyses sur les données récoltées par les deux autres. Voilà, ce n’est ni vraiment un article de pédagogie critique ni un article sur le paranormal, c’est sur la croyance au paranormal donc ça relèverait de la psychologie de la religion ou de la psychologie anomalistique mais il ne l’a publié que dans des livres, mais si on veut être un peu plus généreux on va considérer qu’Agone et Skeptical Inquirer sont des revues scientifiques ce qu’elles ne sont pas vraiment, il n’y a pas vraiment de peer review. S’il l’avait publié dans une revue de psychologie de la religion ou de psychologie anomalistique ça aurait été déjà mieux. Donc voilà, à part ça je n’ai pas vu passer grand chose au cours des années, en tout cas en terme de publications strictement scientifiques.
On va me dire « Oui, mais ce n’est pas grave », en fait si c’est grave, par exemple quand je critique Auguste Messeen sur les ovnis, il fait des tas d’affirmations à propos du phénomène ovni et un de mes contre arguments classique c’est de dire : « Oui mais il n’a rien publié dans les revues scientifiques en peer review, il a juste publié dans des revues ufologiques ou dans des livres, comme celui de la COBEPS par exemple ». Donc si c’est un argument qu’on utilise contre les tenants de certaines hypothèses en ufologie ou en parapsychologie etc., je vois mal pourquoi ça ne pourrait pas être un problème de l’autre côté, contre argument classique.
Deuxième contre argument : c’est pas grave parce que Broch est juste un vulgarisateur. Ok, ça peut être un argument mais il faudrait voir si c’est clair dans l’esprit des gens que c’est juste un vulgarisateur et le problème aussi c’est qui vulgarise-t-il ? Parce qu’à ce moment-là s’il vulgarise les travaux d’autres personnes, dans quelle mesure est-ce que c’est clair pour les lecteurs ? Est-ce qu’il le fait bien ? Là ça devient un problème récurrent dans ses livres, il y a peu de références, par exemple dans « Devenez sorciers devenez savants » il n’y a pas tellement de sources, c’est très peu référencé. Je vous invite à comparer avec un livre comme celui de Michel de Pracontal, « L’imposture scientifique en dix leçons » par exemple, il vulgarise, il fait de la revue de littérature, il présente certaines thématiques, mais c’est blindé de sources, on sait très bien de qui il prend quelles idées etc. De toutes façon si on dit : « Ok c’est juste un vulgarisateur », ça remets les choses en perspective, mais je ne suis pas sûr que tout le monde ne se l’imagine comme ça.
La nature incohérente du projet zététique.
Alors c’est la question de savoir ce qu’est la zététique, c’est même un problème avec le scepticisme en général, mais c’est encore plus fort, cristallisé dans la zététique avec un double projet qui est d’un côté l’enseignement de la pensée critique et de l’autre l’étude scientifique du paranormal.
Alors quand j’aborde ce point on me dit : « Mais non, c’est clair, en fait la zététique c’est juste l’enseignement de la pensée critique ». Si vous prenez la thèse de Richard Monvoisin, il va vous expliquer que la zététique c’est une méthode d’enseignement de la pensée critique, moi j’aime toujours ajouter : « Une méthode parmi d’autres d’enseignement de la pensée critique ». Evidemment si on me dit ça je suis d’accord, mais alors si le but c’est d’enseigner la pensée critique pourquoi consacrer ses livres au paranormal ? Evidemment c’est une idée qu’on retrouve chez certains sceptiques américains, c’est-à-dire que le paranormal serait une « Gateway drug » c’est-à-dire une drogue qui fait passer à une autre drogue, par exemple on prend du cannabis et ça nous ferait passer à l’héroïne, et donc le paranormal ne serait qu’une excuse pour introduire les gens à la pensée critique ou à la méthode scientifique, etc. Mais ça me pose problème à différents niveaux parce que ça veut dire clairement que la zététique ce n’est pas l’étude du paranormal, alors quand je dis ça on me dit : « Mais oui c’est évident que ce n’est pas l’étude scientifique du paranormal ». Ok, c’est encore quelque chose que le lis et entend régulièrement, ça fait partie des phrases du type « la zététique c’est l’art du doute », « c’est l’étude scientifique du paranormal ». Non en fait la zététique c’est une méthode pédagogique de l’enseignement de la pensée critique, ça c’est ce que la zététique est vraiment. Et alors l’approche gateway drug ça m’a toujours dérangé parce que moi ce que je défend c’est pratiquement la position inverse, c’est que l’étude scientifique du paranormal devrait être une étude d’un sujet comme un autre, ça ne devrait pas être fait dans l’objectif d’initier les gens à la pensée critique ou d’introduire les gens à la méthode scientifique etc. Le paranormal est un sujet comme un autre, il devrait être étudié de la même façon.
Donc sur le plan de la démarche je ne suis pas d’accord, je pense qu’un des problème c’est justement que l’étude scientifique du paranormal a sociologiquement une connotation particulière, mais même sur le fond est-ce qu’enseigner la pensée critique via le paranormal ou le débat sur le paranormal est une bonne idée ? Ce serait une bonne idée si le débat sur le paranormal était facile et aisé je dirais, mais le problème c’est qu’une fois qu’on rentre réellement dans le débat, c’est-à-dire qu’on dépasse un petit peu les réponses simplistes, eh bien c’est un débat extrêmement complexe. Si on commence à parler des méta analyses, de l’épistémologie bayesienne, etc., les discussions qu’il y a réellement actuellement autour de la parapsychologie et de l’existence du psi. On n’est plus vraiment dans des débats faciles, ça ne me parait pas être le genre de choses qu’on va forcément aborder si le but c’est d’enseigner la pensée critique aux gens.
Ce qui nous amène au troisième point qui est :
La question de la pédagogie de l’esprit critique.
Une des choses que l’on retrouve en zététique c’est un ensemble d’effets, ne me demandez pas de connaître les noms, j’ai toujours trouvé les noms relativement ridicules et sans intérêt. Ces listes d’effets, évidemment on nous présente comme faisant partie de la méthode scientifique alors qu’en réalité pour moi ça relève clairement de la philosophie. Mais il y a une discipline qui faisait ça bien avant que la zététique n’arrive, c’est simplement la philosophie, tous ces effets viennent juste de la logique qui est un domaine classique de la philosophie. Comment penser correctement c’est classiquement ce qu’on fait en logique, en rhétorique, ce sont des domaines classiques de la philosophie, on n’a pas besoin de la zététique pour ça. L’intérêt de rebaptiser d’un nom plus entre guillemets « simple » certains raisonnements fallacieux qu’on identifie en philosophie… Le problème c’est que les nouveaux noms ne sont pas forcément plus transparents que les anciens, style « effet bi standard », « effet paillasson », il faut quand même lire la description pour savoir à quoi ça correspond, donc je ne suis pas convaincu. La question c’est : comment est-ce qu’on doit enseigner la pensée critique aux gens ? Je pense que l’enseignement de la pensée critique vient nécessairement par l’enseignement de la philosophie en fait, et au niveau des méthodes maintenant il y a la pratique de la philosophie avec les enfants et d’autres choses. Le problème des listes d’effets c’est que ça présente des réponses simplistes à des questions complexes ce qui est toujours le problème selon moi. Par exemple on a l’impression que le Rasoir d’Ockham s’applique comme ça, voilà, c’est facile ça résout tous les problèmes, alors qu’employer le Rasoir d’Ockham est extrêmement compliqué, il faudrait qu’on en reparle un autre jour, mais ça n’a rien de simple en fait. C’est comme de dire : « La méthode scientifique rejette d’office le surnaturel à cause du naturalisme méthodologique », c’est super, c’est toujours des sortes de raccourcis cognitifs, c’est un peu ce que j’aime à appeler du vocabulaire de Bruno Latour « des mensonges aux enfants », ce sont des réponses faciles mais qui ne problématisent rien. Par exemple : Pourquoi est-ce qu’on ne pourrait pas étudier le surnaturel d’un point de vue scientifique ? Il y a des épistémologues qui défendent qu’en fait on peut étudier le surnaturel d’un point de vue scientifique, simplement le surnaturel a échoué au test. En fait c’est empiriquement qu’on a rejeté le surnaturel et pas sur un principe à priori. Donc en fait il y a moyen de réfléchir sur tout ça, mais ces listes d’effets donnent l’impression que : « Oh voilà… », on a eu un peu ça dans une des dernières vidéos de Lazarus : « Oh comment est-ce que vous savez qu’il n’y a pas eu de complot lors du 11 septembre 2001 ? Eh bien c’est simplement parce que vous appliquez le Rasoir d’Ockham ». Il y a une explication complexe, la théorie de la conspiration, une hypothèse simple, celle que les évènements se sont déroulés tels que les historiens du consensus scientifique classique le considèrent donc il faut choisir… Tout ça est trop simpliste. Le problème aussi est : qu’est-ce qu’on entend par rationalité et esprit critique ? Moi je dis toujours : « On est obligé d’enseigner aux gens la complexité des débats », si on leur donne un permis de conduire dans une pochette surprise ça ne fonctionne pas. Les réponses faciles c’est un peu comme : « Donne un poisson a un homme et il mangera un jour, apprend lui à pêcher et il mangera tous les jours ». Les réponses faciles c’est un peu comme si on lui donnait un poisson maintenant : « Oh je te donne un raccourci, rejette les théories de la conspiration avec le Rasoir d’Ockham, pouf pouf ! Voilà c’est bon ! ». Oui mais on ne lui a pas réellement appris à penser de manière critique. Penser de manière critique c’est un chouya plus compliqué que ça.
Ce qui nous amène ensuite à :
La question du Prix-Défi.
C’est un argument qui est invoqué par pas mal de gens pour dire : « La parapsychologie se dit scientifique et le Prix-Défi a prouvé que le paranormal n’existe pas ». C’est encore une fois un peu dans des raccourcis comme ça. Bon, basiquement dans les choses qui me dérangent à propos du Prix-Défi, chez Broch particulièrement, c’est qu’il n’y a pas grand-chose de publié. Si vous avez un rapport qui détaille les méthodologies et résultats de toutes les expériences qui ont été réalisées dans le Prix-Défi envoyez moi le pdf, je le lirai avec attention, mais à ma connaissance, en terme de publication il n’y a pas grand-chose. En gros on doit croire sur parole : « Voilà, j’ai fait des tests, j’ai rien trouvé », et quand je parle de publication, je ne suis pas encore dans des publication scientifiques, ce serait déjà pas mal qu’on ait un compte rendu de toutes les expériences et leurs résultats, par exemple. Si vous regardez du côté du CNEGU, le groupe d’ufologues auquel je participe, quand ils font l’Opération SAROS ou les recherches qu’ils ont mené ils font des rapports extrêmement détaillés de tout ce qui a été fait, c’est pas super gai à lire mais, je veux dire, l’information est là, quelque part. Pour le Prix-Défi de Broch, on ne sait pas trop ce qui a été fait, comment ça a été fait… Pour James Randi c’est déjà un peu mieux parce qu’il a quand même publié certains comptes rendus dans Skeptical Inquirer, Skeptic Magazine, sur le Net et puis il a réalisé certains des tests en public à TAM, etc., donc il y a un peu plus de transparence même si ce n’est pas encore optimum. Alors de manière amusante on attend un livre des deux côtés, James Randi a annoncé un livre qui parlerait du Prix-Défi de manière détaillé et qui devrait être écrit par un de ses collaborateurs mais à ma connaissance il n’est pas encore sorti, je pense que chez Broch j’avais aussi vaguement entendu parlé d’un livre de ce type-là qui à ma connaissance n’est jamais sorti. En plus maintenant Broch a quand même la collection « Une chandelle dans les ténèbres », mais de toute façon, un pdf, tu le mets sur un site Internet, c’est ce que fait la bande du CNEGU, mais il faut rédiger le document, ça c’est une chose. De toute façon on n’a pas d’informations de ce type-là sur toutes les expériences, en tout cas sur la grande majorité des expériences on ne sait pas ce qui a été fait, mais bon évidemment même si on publie un pdf, ce n’est pas publié dans la littérature scientifique. Ça aurait été pas mal que Broch ait publié dans des revues de psychologie anomalistique ou de parapsychologie certaines expériences qui ont été menées. Bon là on revient sur la question du manque de publications scientifiques.
Puis bon, le Prix-Défi évidemment ça a plus une valeur rhétorique dans le mouvement sceptique qu’une valeur vraiment scientifique, je vais rapidement expliquer pourquoi. Parce que simplement, la science, quand on lit l’épistémologie de la méthode scientifique il n’y a jamais un chapitre sur « Les Prix-Défi dans la science », ce n’est pas quelque chose qui se pratique dans la méthode scientifique, c’est quelque chose qui se pratique presque uniquement dans le débat autour du paranormal. Rien que pour ça c’est problématique. Pourquoi est-ce que le paranormal serait un domaine différent ? C’est un contre argument de base, mais je veux dire que c’est généralement un raccourci cognitif de dire : « Voilà, le Prix-Défi existe ou a existé, en tout cas celui de James Randi existe toujours, si il y avait quelqu’un qui avait vraiment un pouvoir paranormal il aurait réussi le test, donc le paranormal n’existe pas », ça permet de tenir ce raisonnement-là qui tient comme je vais le préciser, moyennement la route.
L’intérêt des Prix-Défi, je l’ai même récemment mentionné sur le balado, c’est la protection du consommateur et c’est très bien, car je ne suis pas contre les Prix-Défi, je suis pour les Prix-Défi pour autant qu’ils soient bien cadrés et qu’on sache bien de quoi on parle. C’est vrai que si quelqu’un fait une publicité d’un certain type et dit : « Je suis capable de faire ceci ou cela », ça vaut la peine de tester la publicité en question et voir s’il est vraiment capable de faire ceci ou cela. Et donc dans une optique de protection du consommateur, si un voyant dit : « Je suis capable de fournir tel service que je fait payer à mes consommateurs », eh bien on peut le tester et voir si ce qu’il nous vend mérite l’argent qu’il demande pour le service donné. Donc dans cette optique-là qui est une optique légèrement différente d’une optique purement scientifique, je suis à 200% pour les Prix-Défi dans cette optique de protection du consommateur.
Alors les problèmes au niveau de l’argumentation que le paranormal n’existe pas à cause du Prix-Défi, c’est que ça teste ce que les pratiquants (voyants, sourciers…) pensent être capable de faire, et évidemment il se pourrait très bien que les capacités paranormales ou que les phénomènes paranormaux existent sans que les individus qui se prétendent voyants etc. ne soit capable d’évaluer objectivement leurs propres capacités, c’est tout à fait possible. L’un n’implique pas l’autre, déjà tous les parapsychologues acceptent l’idée qu’il y a des pseudo voyants, des faux médiums, donc ça ce n’est même pas discuté, c’est le consensus, tout le monde est d’accord pour dire qu’il y a des faux voyants, des faux médiums, des gens qui simulent par des techniques de mentalisme des dons paranormaux. Mais donc au-delà de ça la question théorique en fait c’est de dire : est-ce que si le psi existe (la perception extrasensorielle, psychokinèse, etc.), est-ce que certaines personnes seraient capables d’évaluer l’aptitude des candidats à utiliser ces capacités ? Ça n’a rien d’automatique en fait, on pourrait très bien imaginer que le psi existe et qu’il se manifeste d’une manière tellement chaotique et imprédictible ou incohérente que personne ne soit vraiment capable d’évaluer la capacité d’un candidat à l’évaluer, ou que les gens comme les médiums, parce qu’ils mélangent le psi avec des techniques de mentalisme s’illusionnent sur leurs capacités réelles. Donc finalement le Prix-Défi ne prouve pas que le psi n’existe pas, et ce n’est même pas sa fonction, comme je l’ai dit la fonction d’un Prix-Défi sceptique c’est la protection du consommateur. La question n’est pas de déterminer si les capacités paranormales existent, la question est de savoir si quelqu’un qui fournit un service est capable de réaliser ce service.
Donc c’est vrai qu’en parapsychologie il y a deux grandes manières d’aborder les choses, il y a les techniques des Prix-Défi, tester les voyants etc., et puis étudier le psi de manière séparée. Classiquement les sceptiques préfèrent la première version et ceux qui ne sont pas trop du mouvement sceptique préfèrent l’autre version. Moi je suis pour les deux versions, je pense que les deux ont de l’intérêt, la ligne de démarcation idéologique entre les deux méthodes n’a pas de sens selon moi, je pense que la version « protection du consommateur » a de l’intérêt parce qu’il faut protéger les consommateurs. Le marché de la voyance est un énorme marché qui rapporte énormément, si les voyants affirment des choses qu’ils ne sont pas réellement capables de fournir c’est un problème. Mais essayer de voir si le psi existe réellement, ça c’est un tout autre domaine, c’est une autre question qui n’est pas connectée à la première.
Tout ce que je viens de dire est aussi en relation avec un dernier point qui est que finalement mon impression, au fil des années, je n’ai pas découvert ça lorsque j’ai lu Broch la première fois, mais quand je lis Broch j’ai l’impression que :
Premièrement sa connaissance de la littérature parapsychologique n’est pas très importante, qu’il n’est pas aussi expert qu’il a l’air de vouloir se présenter.
Et deuxièmement j’ai l’impression qu’il présente de manière largement incorrecte le débat scientifique sur la nature du paranormal, c’est-à-dire que les auteurs que je lis, même sceptiques comme Ray Hyman, Richard Wiseman ou Chris French présentent les choses très différemment. Je veux dire par exemple : dire qu’il n’y a aucune preuve de l’existence du paranormal, je ne sais pas si Broch le dit clairement comme ça mais c’est quand même le message qu’on retire, dire que la parapsychologie c’est de la pseudo-science, tous les résultats parapsychologiques s’expliquent par la fraude, l’incompétence etc. L’idée qu’il n’y a absolument aucun élément qui donnerait à penser que d’authentiques phénomènes paranormaux existent, c’est faux, il y a eu des publications depuis la fondation de la Société pour la recherche métapsychique en Angleterre jusqu’à aujourd’hui, des résultats qui semblent suggérer qu’il existe bien d’authentiques phénomènes paranormaux. Alors on peut être très sceptique de ces résultats mais c’est très différent de dire qu’il n’y a absolument aucun élément qui donnerait à penser que d’authentiques phénomènes paranormaux existent.
Encore une fois, si vous lisez ce que dit un Chris French, qui reste quand même mon auteur favori dans ce sujet à l’heure actuelle, c’est quand même beaucoup plus nuancé que ça. Dans un article récent de Wagenmakers « Skeptical eye on psi », un œil sceptique sur le psi, il explique que si on prend les résultats actuels fournis par les parapsychologues pour l’existence du psi et qu’on les regarde… par exemple moi je les regarde avec l’entraînement de base qu’on m’a donné en statistiques et en psychologie, eh bien je devrai conclure que le psi existe, ils ont des méta analyses positives, les résultats qu’ils donnent semblent convaincants. Alors on rejette ces résultats pour d’autres raisons, c’est-à-dire que bien sûr on sait que le paranormal n’existe pas (rires), mais Wagenmakers lui comme il est sceptique il va dire : « Oui mais en fait on peut postuler que soit cela montre le problème de la manière dont on utilise les statistiques en psycho », donc ça c’est un argument classique qui date depuis très longtemps : si les parapsychologues arrivent à prouver statistiquement l’existence du psi c’est qu’il y a un problème avec les stats parce qu’on sait tous que le psi n’existe pas. Et évidemment l’autre possibilité que dit Wagenmakers c’est : « On utilise des statistique bayesiennes et alors on utilise une plausibilité antérieure très faible à cause du manque de mécanisme (on ne sait pas comment le psi fonctionnerait d’un point de vue physique) et donc si on utilise une plausibilité antérieure très faible, même les résultats actuels de la parapsychologie ramènent à une probabilité que le psi existe réellement assez faible ».
Enfin bref, là de nouveau je rentre dans les vrais débats sceptiques sur l’existence du psi mais c’est un autre débat, ce sont de vraies discussions sur le débat en parapsychologie mais ce n’est pas le genre de choses qu’on retrouve chez Broch, c’est ça que je veux dire. J’ai l’impression que comme il ne présente pas tous ces contre arguments… Mais on va me dire : « Oui mais ça date des années 1980, bla bla bla », ce qui est le point suivant dans ma discussion, mais déjà dans les années 1980 Rhine avait déjà fait des tas de travaux, il y avait déjà des choses à discuter autres que ce que Broch discute, encore une fois la société métapsychique anglaise date de la fin du 19ème siècle, il y avait une littérature surabondante. Bon évidemment je suis bien conscient que c’était l’ère d’avant Internet, qu’il était plus difficile de se procurer certains documents, ok, mais bon ça revient toujours à dire : « Ce qu’il écrivait était ok dans les années 1980 mais pas ultérieurement », bien que je pense qu’il aurait pu s’abonner à la revue de la société pour la recherche métapsychique anglaise ou l’association parapsychologique américaine et recevoir la revue s’il était vraiment motivé pour lire cette littérature. Mais bon c’est toujours le contre argument de la « bulle temporelle » : ce qu’il a fait c’était super dans les années 1980, c’est le point suivant dans ma discussion.
Ce que faisait Broch c’était super dans les années 1980.
Ce contre argument est vrai pour les années 1980, c’est-à-dire que, ok, je veux bien admettre, c’est vrai, ce qu’il faisait dans les années 1980 dans le monde francophone : il était le seul à essayer d’introduire le scepticisme scientifique. Mon point c’est toujours un peu de savoir s’il l’a bien introduit ou pas mais ça c’est un autre problème. Donc évidemment aux Etats-Unis, Martin Gardner le fondateur du mouvement septique contemporain américain, c’est les années 1950, Houdini avant ça, donc évidemment Broch n’est pas l’inventeur du bazar. Mais donc en France c’était un peu le calme plat et il a eu ce mérite-là probablement dans les années 1980 d’essayer de faire quelque chose de ce côté-là. Ok, granted ! Je l’accorde.
Le problème c’est qu’il ne s’est pas arrêté aux années 1980, c’est qu’il est passé aux années 1990, aux années 2000, et qu’on est en 2014 et qu’il est toujours dans des interviews pour Lazarus, etc. En fait il est en train de faire un comeback via Lazarus et le problème c’est qu’il n’y a pas grand-chose qui a changé en fait, si vous lisez ses livres des années 1980 et ce qu’il raconte maintenant c’est grosso modo la même chose. C’est le sang de Saint Janvier qu’il nous refourgue à tout les coups, son schéma de la diminution de la pk au fil du temps parce qu’il y a des gens qui prétendraient que les statues de l’Île de Pâques auraient été soulevées par psychokinèse. Ce sont tous les trucs qu’il a recasé tout au long de ces années, il n’y a pas eu vraiment d’évolution entre la fin des années 1980 et ce qu’il raconte maintenant, on est 20 ans plus tard et c’est grosso modo toujours la même chose. S’il avait mis à jour, s’il s’était tenu au courant des nouveaux enjeux, s’il avait continué à être dans le mouvement ç’aurait été bien, mais que 20 ans après on nous refourgue les mêmes arguments, les mêmes sujets, les mêmes choses que dans les années 1980 sans modifications ni mises à jour, pour moi c’est un peu problématique.
Donc cet argument des années 1980 tient moyennement la route selon moi.
En éditant un peu cet épisode du podcast je me suis rendu compte que ça valait la peine que je sois un peu plus précis sur la question des informations que l’on a à propos du Prix-Défi où j’ai été un peu vague sur ce qui était actuellement disponible sur les résultats des tests du Prix-Défi.
Donc il y a un certain nombre d’informations (1,2) qui sont disponibles actuellement sur le site du défunt Cercle Zététique qui était l’organisation qu’avait créée Paul-ÉricBlanrue qui est aujourd’hui beaucoup plus célèbre pour ses positions politiques, on va dire, que beaucoup jugeront problématiques concernant par exemple la shoah ainsi que ses amitiés avec certaines personnes que nous ne nommerons pas, donc je veux dire : « Renseignez-vous sur Paul-Éric Blanrue, le fondateur du Cercle Zététique ». Il a un site web qui s’appelle le Cercle Zététique qui n’a plus été mis à jour depuis la fin de cette organisation. Il y a un certain nombre de choses qui avaient été publiées sur ce site à l’époque à propos du Prix-Défi international, à noter que Paul-Éric Blanrue a écrit quelques livres de Zététique, j’en ai lu un certain nombre et ils sont pas mal, ça donne à réfléchir et c’est assez intéressant de voir quelqu’un qui a écrit des bons livres zététiques et qui défend certaines positions politiques. Enfin voilà, si la zététique c’est l’enseignement de la pensée critique, d’ailleurs si vous lisez certaines interviews, il y en a de très amusantes où Paul-Éric Blanrue estime que ce qu’il pense à propos de la Shoah tient de son application de la pensée zététique, de la pensée critique. Enfin bon, c’est un autre débat. Mais donc c’est sur le site du Cercle Zététique qu’on a quelques informations sur le Prix-Défi, et si j’ai parlé de ça et de Paul-Éric Blanrue précédemment c’est pour dire qu’avoir ces textes-là concernant le Prix-Défi sur ce site-là est immédiatement extrêmement problématique. Moi je pense qu’il faudrait demander à ce qu’ils soient retirés de ce site et les publier ailleurs, et si les résultats ne sont publics que sur ce site-là… Ils sont peut-être publiés ailleurs, il faudrait aller voir. Encore une fois je peux toujours postuler qu’il y a une information qui m’a échappée, je ne suis omniscient, mais en tout cas immédiatement si on googlise, ou sur la page Widipedia d’Henri Broch, c’est vers le site du Cercle Zététique qu’on nous renvoie pour des informations à propos du Prix-Défi. Oui, donc les gars il faut bien différencier Cercle Zététique et Observatoire Zététique, ce n’est pas du tout la même chose, les deux organisations se sont séparées il y a déjà pas mal d’années maintenant. De toute façon le Cercle Zététique n’existe plus. Donc il y a plusieurs endroits où on peut trouver des petites informations, certains textes écrits par Blanrue, certains par Broch.
Il y a un texte, je pense écrit par Broch vu le style, la manière dont c’est rédigé, qui s’appelle « Le Prix-Défi international de 200.000 euros : Médiums, voyants, astrologues, radiesthésistes, sourciers et autres sujets-psi, les scientifiques ont toujours gardé l’esprit ouvert, 15 années de tests. 264 candidatures… ». Je pense que vous aurez, à ma connaissance, le texte le plus détaillé sur les résultats obtenus à propos du Prix-Défi international de Broch, Majax et Théodor. Donc on nous apprend qu’il y a eu 264 candidatures, évidemment la première chose à dire c’est que 264 candidatures ça ne veut pas dire du tout 264 sujets testés, comme on va rapidement le voir. Alors il y a un certain nombre de sujets pour lesquels on nous donne un peu plus d’informations, si je ne peu suis pas trompé j’en ai compté 46, et les informations qu’on va avoir c’est par exemple, j’en prend un au hasard :
— 262 A.L. (France). Affirme avoir des facultés psychiques, demande si (le laboratoire) »vous acceptez l’utilisation d’un dispositif destiné à la psychokinésie pour démontrer mes facultés psychiques » (9 janvier 2002); réponse positive du laboratoire. Echange de courriers. Dossier incomplet et formulaire manquant : aucune proposition concrète d’expérience de démonstration des facultés psychiques alléguées. Dossier clos.
Donc dans les 46 cas qui nous sont présentés il y en a un certain nombre pour ne pas dire un nombre certain qui sont en fait des abandons, par exemple on a :
— 254 J. P. (France). Aucune revendication précisée (29 janvier 2001). Abandon.
Donc il y en a un certain nombre où apparemment il y a eu un test effectif qui a été réalisé, et ce qu’on nous en dit c’est par exemple :
— 244 E.S. (France) Affirme « en méditation, être capable de percevoir la maladie ou l’infirmité dont souffrirait un individu qui lui est inconnu,… que la personne soit présente ou non, à partir du nom, prénom, âge, sexe et lieu de résidence ». (5 septembre 2000). Testée au laboratoire le 25 mai 2001. Echec complet.
Et il y a quelques photos. Donc voilà, c’est le genre de rapport qu’on a, par exemple sur le dernier que je viens de vous lire, évidemment la méthodologie n’est absolument pas précisée. Pour le reste, si on fait la différence entre 264 et 46, je ne sais pas si on doit inférer que tous les candidats sont des candidats non testés et donc que tous les cas testés présentés sur la page soient les uniques cas qui ont été réellement testés. A ce moment-là ça n’en fait pas beaucoup, une quinzaine ou une vingtaine. Il nous dit que ce sont quelques exemples, je ne sais pas trop s’il présente tous les sujets qui ont été testés. Alors il nous dit aussi : « … abandons et reculades (très nombreuses et qu’il paraît inutile de rapporter en détail ici)… ». Oui, je ne sais pas, c’est peut-être qu’en fait tous les autres cas sont des abandons, donc en fait au final il aurait dû réaliser en 15 ans une quinzaine de tests, ce qui ferait en moyenne 1 test par an, quelque chose comme ça, grosso modo parce que je n’ai pas compté exactement le nombre de tests dont il parle ici. Voilà, juste pour être plus précis au niveau du Prix-Défi, encore une fois ce qui m’embête dans ces descriptions c’est l’aspect très sommaire de la description des résultats, encore une fois j’en vois un autre :
— 247 G.G. (Italie) Affirme pouvoir modifier, par son action psychokinétique, la fréquence ou l’amplitude d’une voix ou d’un signal sonore lors de l’enregistrement sur un magnétophone ou sur tout autre support (19 octobre 2000). Testé le 4 avril 2001 au laboratoire, avec une gamme de fréquence très large, au choix du médium, de 50 Hz à 12000 Hz. Echec complet.
Voilà, on ne sait pas trop, il n’y a pas de revue de la littérature sur des prétentions similaires, pas d’argumentation sur la méthodologie, la méthodologie utilisée n’est jamais très détaillée, on ne sait pas trop ce qui a été fait et comment ça a été fait. Qu’est-ce qu’il entend par « Echec complet » ? Par ce que, je veux dire, quand on fait des tests avec des voyants, qu’on utilise des méthodologies avec des aspects statistiques, généralement, par hasard, le pseudo voyant pourrait réussir à avoir des résultats positifs. C’est très rare que le sujet fasse 0 / 15 si on lui demande de deviner des choses. Si vous reprenez les protocoles classiques de l’OZ, généralement le pseudo médium va par hasard avoir l’un ou l’autre résultat positif dans le tas. Enfin voilà, si c’est ça son résultat détaillé, en fait je pense que c’est ça son résultat détaillé qui n’est en réalité pas très détaillé, j’ai envie de dire que ce n’est pas très impressionnant. De manière générale si vous rejetez l’existence du paranormal parce que Broch a testé 15 participants à son Prix-Défi et qu’ils ont fait des échecs complets sur base de leur protocole qui n’est pas vraiment détaillé, je pense que ce n’est pas génial en terme de pensée critique et qu’on pourrait s’attendre à mieux.
Il y a eu pas mal de discussions dans la littérature sceptique sur le ton vraiment cassant employé par Broch, par exemple pour désigner les parapsychologues il utilise le terme de « parapsyphiles » qui est un terme Brochien qui n’est jamais utilisé dans la littérature, c’est en gros une insulte, une façon de dire : « Pour les imbéciles qui croient en l’existence du psi on va les appeler les parapsyphiles ». Voilà, qu’est-ce qu’ils mettent d’autre encore, dans le même tonneau ? : « Voilà les banalités que certains nous ont assénées. ». Donc on est un peu loin du ton scientifique qu’on pourrait attendre d’un véritable article scientifique. Et encore une fois je pense que si on fait ce genre de recherches, ce genre d’études, une revue de la littérature de ce qui a été fait de similaire auparavant s’impose. Et puis bon, encore et toujours la méthode scientifique passe nécessairement, à mes yeux en tout cas, par la revue par les pairs, par la publication dans une revue scientifique à comité de lecture, ce que n’est certainement pas le site Web de Paul-Éric Blanrue.
Voilà, c’était juste pour être un peu plus précis sur ce que j’avais raconté auparavant, parce que j’étais resté un peu vague et je suis sûr que quelqu’un m’aurait envoyé le lien en me disant : « Oh voilà, Henri Broch a fait un rapport extrêmement précis de son Prix-Défi ». J’avais lu cette page il y a des années, je la connaissais depuis longtemps mais entre le ton extrêmement cassant et l’absence de référence, de méthodologie précise, le fait que la grosse majorité des candidats ce sont des non tests en fait, ce sont des refus, des gens qui n’ont effectivement pas passé le test, enfin voilà, je n’étais pas énormément impressionné. A noter que la question des abandons se produit aussi pour James Randi, c’est un problème, si on est une personnalité extrêmement critique du paranormal avec un ton extrêmement cassant, qu’on appelle les gens des « parapsyphiles » pour Henri Broch ou des « woo-woo » pour James Randi, c’est assez normal que les gens ne se poussent pas au portillon pour faire des expériences. Alors évidemment si vous êtes un pseudo voyant qui savez que vous utilisez des trucs de mentaliste, ça je suis bien d’accord que vous n’allez pas accepter de vous faire tester, mais la grande majorité des voyants, même dans une optique sceptique classique, sont sincères, ne savent pas qu’ils utilisent la lecture à froid, etc. Donc finalement un test par an ce n’est pas énorme, je pense que l’Observatoire Zététique a une politique très saine en matière de ton, et c’est dommage qu’Henri Broch ne l’ait pas appliqué à l’époque. Encore une fois si on a un ton cassant, c’est normal… Je veux dire, si je suis au courant de qui il est et que je suis un voyant sincère je n’aurai pas envie de me faire tester.
Voilà, j’ai un peu fait le tour de ce que je voulais dire sur ce sujet, et juste pour terminer :
Quelque chose que j’aime bien ;
C’est un point dont je voulais parler parce qu’on me dit : « Oui mais il a un laboratoire de zététique », l’argument c’est qu’est qu’il fait dans son laboratoire de zététique ? On revient sur l’absence de publications. Quel type d’études est-ce qu’il a fait dans son laboratoire ? Il n’y a pas de publications. Il fait des conférences, donc son laboratoire ça serait plutôt un laboratoire de vulgarisation scientifique, non je ne sais pas, ça n’a pas beaucoup de sens, mais ce terme de laboratoire… Alors là le contre argument classique c’est de me dire : « Oui mais il est tout seul ». D’accord, bon, je pense que tout seul, en 20 ans, il aurait quand même pu mettre à jour certaines choses ou venir avec de nouvelles idées etc. Mais bon, peut-être que j’exagère, peut-être qu’il a fait de nouvelles choses dont je ne suis pas au courant, mais ce que je veux dire c’est que quand je vois ce que reprend Lazarus d’Henri Broch, son schéma sur la psychokinèse, il était dans la fameuse publication dont j’ai parlé tout à l’heure qui date de la fin des années 1980, et donc on le remet chez Lazarus Mirages comme ça, ou le sang de Saint Janvier, Lazarus Mirages a fait un épisode, ça date aussi de perpète. J’attends toujours de voir des nouvelles choses en provenance de Broch, je suis preneur.
Oui, donc qu’est-ce qu’il fait dans son laboratoire de zététique ? Oui il donne des conférences, c’est vrai, sur l’archéomanie, bon ce n’est pas vraiment de la recherche. Donc bon, il est tout seul, ok, d’accord. Donc une des choses qu’il fait maintenant et qui est plutôt sympa c’est la collection « Une chandelle dans les ténèbres », donc il a publié pas mal de bouquins qui sont sympathiques, il y en a certains de Nicolas Gauvrit, et ça reste de la vulgarisation extrêmement vulgarisée, ma ça c’est pas mal, c’est vrai que c’est sympa de publier la collection « Une chandelle dans les ténèbres ». Donc le point positif pour moi c’est la collection « Une chandelle dans les ténèbres ».
J’ai un peu fait le tour, encore une fois je veux dire, je suis un peu frustré sur ces discussions parce que souvent quand je parle du débat sur le paranormal on me cite Henri Broch comme si ça résolvait tout, alors que pour moi ça ne résout rien du tout, il engage tellement peu la littérature parapsychologie. Si on me citait Ray Hyman ou Richard Wiseman je serai déjà plus convaincu, ou Chris French, mais Broch… Donc c’est vrai qu’il y a une certaine frustration. Mon idée générale avec tout ce que je viens d’expliquer c’est que le mouvement sceptique francophone dépasse Broch, simplement. Et pour être parfaitement honnête, quand j’ai créé mon blog en 1997 et mon podcast un ou deux ans plus tard, mon idée générale c’était que Broch, c’était terminé puisqu’il était très âgé et je suppose qu’il est à la retraite, enfin de toute façon… C’est juste que maintenant il est en train de faire un retour avec Lazaus, et tous les gens qui gravitent autour et qui aiment beaucoup ce que fait Lazarus Mirages. Dans les récentes vidéos de Lazarus Mirages il y a des choses que j’aime bien et des choses que j’aime moins, mais le problème est toujours de comment est-ce qu’on vulgarise ? Est-ce qu’on vulgarise de manière trop simplifiée ou pas ? Et la connexion avec la politique qui est toujours un peu problématique selon moi.
Oui je pense que le mouvement sceptique devrait dépasser un peu Broch, mais apparemment on est de nouveau plongé dedans à cause du succès de Lazarus. Voilà, donc de toute façon, moi comme je le dis toujours je ne suis pas très fan de Broch, ça ne veut pas dire que je le déteste, c’est un contre argument : « Oui t’aimes pas Broch », pfff, oui je n’aime pas Broch comme je n’aime pas tous les gens que je critique ici ou là, comme Auguste Messeen. C’est un argument bateau, c’est ce que me disent toujours les ufologues défenseurs de l’hypothèse extraterrestre : « Ouais mais tu critiques Auguste Messeen parce que tu ne l’aimes pas ». Tout est toujours ramené à de l’interpersonnel. Non ce n’est pas de l’interpersonnel, c’est juste que je pense que le mouvement sceptique… Je crois que le but de ce podcast, enfin de tout ce que j’ai fait ces dernières années (Bruxelles sceptiques au pub, le blog etc.) c’est d’essayer de rendre la communauté sceptique francophone plus sophistiquée, avoir de meilleurs arguments, des meilleurs raisonnements, justement engager la complexité, par exemple vraiment engager le débat avec la littérature parapsychologique plutôt que d’être dans l’argument d’épouvantail tout le temps. Moi, par exemple pour la contre apologétique chrétienne, plutôt que de se moquer de la religion et d’être dans des arguments qui volent au raz des pâquerettes, engager vraiment le débat avec ce que les théistes on de meilleurs intellectuels. C’est toujours, est-ce qu’on prend des « low hanging fruits », des adversaires intellectuels faciles ou est-ce qu’on va chercher le meilleur ? Toujours casser du sucre sur Yves Lignon, mais je veux dire, est-ce que c’est vraiment le parapsychologue avec lequel on devrait engager le débat ? Et encore, Yves Lignon ce n’est pas le pire, il est plutôt copain avec la bande de l’OZ. Quand je critique des ufologues, je prends Auguste Messeen qui est physicien, Pierre Lagrange qui est sociologue, je ne m’embête pas avec le blogueur du coin.
Voilà, je pense qu’il faut faire un peu évoluer les choses, essayer d’avoir un mouvement sceptique qui est moins idéologique, plus intéressé par le vrai débat d’idées.
C’était un peu ce que je voulais dire.
D’ici là, à la semaine prochaine.
Sceptiquement vôtre.
8 réponses
  1. bug-in
    bug-in dit :

    J’ai connu le scepticisme par la philosophie, puis par Baillargeon (petit cours d’autodéfense intellectuelle), puis je l’ai redécouvert par le balado en cherchant des discussion rigoureuses sur la question du paranormal (ce dont le livre précédent manque a mon avis). J’ai déjà parcouru les livres dit zététique, peut-être pas celui titré « le paranormal », mais d’autres du même tonneau. J’avais trouvé ça pas assez rigoureux pour mon esprit philosophique, dans le sens ou l’écriture n’est pas philosophique, ou rigoureuse, ça insulte, ou ça fait des critiques, mais ça reste pauvre en argument, et j’ai du mal a accrocher au noms des percepts/biais proposés…. parfois je les préfère même en latin ou anglais car ils sont plus « juste » a mon avis.

    Ensuite j’ai eu du mal avec le groupe zététique local, non seulement a cause du passé ext. Dr. De l’un d’entre eux (cercle zététique), mais aussi une discussion interne au groupe ou on m’a quasiment insulté par courriel pour un désaccord, du coup j’avais répondu sur le même ton, mais comme je venais d’arriver dans le groupe, mon message a été mal pris et c’est moi qui est du m’excuser… j’ai fait l’impasse, mais ça m’a pas motivé pour y retourner, par contre entre temps j’ai assisté au cours de scepticisme du CorteX a l’université de Montpellier et j’ai bien accroché, ce qui m’a rassuré un peu. Puis au fur et a mesure (env. 3 ou 4 mois) j’ai accroché aux discussions sur la page zététique de Facebook, mais je n’accroche pas du tout au terme et je préfère le sujet du paranormal que celui des para-sciences. En fait pour moi les deux sont intéressants, mais bon, je ne peux pas nié mon plaisir a « traiter » des sujets dit paranormaux qui éveille, ou motive plus mon imaginaire que rejeter tout savoir qui n’a pas été validé dans une publication par des pairs. Par ailleurs, je reste définitivement un sceptique proche de l’élan philosophique.

    Après chez moi, je suis assez d’accord sur l’idée que le paranormal a facilité mon ouverture à d’autres sujets, mais je pense que c’est aussi du a ma pré-formation philosophique. Je conçois que l’on puisse vouloir une étude scientifique du paranormal, et pas qu’une pédagogie de l’esprit critique (d’ailleurs qu’est ce qui la distinguerai de la philosophie, et particulièrement de l’épistémologie et philosophie des sciences ?). Je te rejoins sur cet avis.

    Après l’étude du paranormal que tu proposes est elle une science, une philosophie ? Au sens de abouti t’on a des traces, des preuves ? J’ai l’impression qu’il y a un peu des deux. Car l’approche est philosophique, mais des fois on retrouve des principes qui reviennent. Pourquoi peut-être pas une « philosophie du paranormal »… le problème c’est qu’on pourrait partir du principe de l’acceptation du paranormal.

    Je pense que la catégorie proposé de « science du paranormal » pose vraiment problème du a la diversité des sujets. Et peut-on expliquer tout les phénomènes paranormaux par une psychologie spécifique ? Comment expliquer l’étendue de l’apparente diversité des sujets ? Puis c’est paradoxal, dans la mesure ou on attend de la science habituellement qu’elle ennonce des lois (cas classique) ou qu’elle se base sur des preuves, traces, détails (comme l’histoire), mais a minimat qu’il y ai des conventions des gens du domaines (sinon adieu les mathématiques comme science), et du coup, je ne suis pas sur que cela existe déjà dans cette proposition d’étude scientifique (je dirai rigoureuse, définitivement) du paranormal. Après j’ai l’impression que le champs est plus et mieux constitué aux USA… je suis loin encore de tout cela.

  2. admin
    admin dit :

    Bonjour bug-in,

    Merci pour ton feedback. :-)

    « Après l’étude du paranormal que tu proposes est elle une science, une philosophie ? »

    Pour moi l’étude du paranormal est intrinsèquement pluridisciplinaire. Les historiens doivent étudier le paranormal, les psychologues doivent étudier le paranormal, les physiciens doivent étudier le paranormal… Et les philosophes aussi… Je pense que ce serait bien qu’il y ai des colloques interdisciplinaires qui mettent tout le monde dans une même pièce à un moment donné pour que chaque discipline sache un minimum ce que les autres font, mais c’est tout.

    Ensuite il y a la question de la psychologie anomalistique, de la paranthropologie et de la parapsychologie: pour moi c’est très bien que ces trois domaines se développent dans le monde académique. Une des raisons pour lesquelles les idées fausses sur le paranormal fleurissent est parce qu’il y a très peu d’universitaires qui travaillent sur ces sujets (pour des raisons qui relèvent de la sociologie des sciences). Plus on aura de gens qualifiés qui travaillent ces questions et en débattent au meilleur niveau intellectuel, mieux ce sera selon moi.

    Cordialement,

  3. goulven Kerbellec #skeptboarder
    goulven Kerbellec #skeptboarder dit :

    Comme beaucoup de francophones je vois Henry Broch comme l’homme qui a tiré l’opercule sur notre tête de Flamby.
    Bien sûr il y avait d’autres auteurs sceptiques, mais à l’époque je suis passé à côté. En trouver un était déjà une nouveauté. Un esprit se voulant sans a priori, en croisade contre les manipulations. Parce que c’est là son principal mérite à mon avis. Il a eu le courage de lister des questions clivantes, et de poser la question de la preuve, la où les intellectuels balayaient de la main sans apporter d’arguments.
    Est-ce qu’il aurait du publier dans des revues ? La charge de la preuve étant aux tenants, s’il n’y a pas de publication des tenants, on ne peut pas lui reprocher çà. Par contre s’il y a des publications des tenants, et qu’il a produit des expériences contradictoires, alors il aurait du les publier.
    On se pose surtout la question de la place de tout çà. Doit-on laisser les analyses contradictoires à des labos privés, à des magazines de protection du consommateur, à des associations ou à des universitaires ?
    L’association Observatoire Zététique est superbe, et ils ont su améliorer le discours, les protocoles et la mise en avant des données (car oui, on ne peut pas se satisfaire des infos de Broch de l’époque sur certains sujets). Par contre une association c’est fragile et çà a peu de moyens.
    Pour moi çà devrait être un service publique dédié, qui pourrait être hébergé dans un labo fourni en ressources financières et humaines (oui je rêve, mais bon …).
    Il y aussi la question de l’enseignement. Quels sont les cursus qui intègrent de l’initiation ou de la formation à l’esprit critique ? Alors qu’il y a une richesse incroyable à apporter sur le sujet, du primaire au doctorat.
    Sur la nomenclature des biais cognitifs j’y trouve un intérêt pédagogique. C’est de la reformulation pour certains, mais c’est présenté différemment, une vulgarisation suffisamment ludique pour qu’on lui trouve une bonne valeur (mon avis perso sur la question).
    Sur le renouveau de Broch et Lazarus, la réutilisation d’anciennes expériences et démonstrations ne me choque pas à partir du moment où elles sont valides. Lazarus touche un plus grand publique qui n’a jamais eu accès à Broch dans l’ensemble. Par contre à chaque nouvelle utilisation le travail de bibliographie, de statistique et publication des données doit être revu et actualisé, c’est la moindre des choses.
    Parce que après tout, un zététicien, un sceptique, doit être capable de sabrer sans sourciller des informations qu’il a pu produire précédemment si problème il y a.
    C’est pas facile, on est des humains, mais si on n’est pas capable de le faire, qu’est-ce qu’on fait là ?
    Shorter : on doit pouvoir critiquer certaines données de Broch, et ne pas être pris pour le gars qui crache dans la soupe. Pour autant, le renvoyer globalement à un statut d’homme du passé sera interprété (selon la culture de l’interlocuteur) comme un manque de respect.

  4. admin
    admin dit :

    Bonjour skeptboarder,

    « Est-ce qu’il aurait du publier dans des revues ? La charge de la preuve étant aux tenants, s’il n’y a pas de publication des tenants, on ne peut pas lui reprocher çà. Par contre s’il y a des publications des tenants, et qu’il a produit des expériences contradictoires, alors il aurait du les publier. »

    A l’époque où Henri Broch arrive sur le devant de la scène en France, la Society for Psychical Research existe depuis 1882, l’Institut métapsychique international depuis 1919 et la Parapsychological Association depuis 1957 (organisation membre de l’Association américaine pour l’avancement des sciences depuis 1969). Le Journal of Parapsychology existe depuis 1937 et le Journal of Scientific Exploration existe depuis 1987 (deux journaux scientifiques consacrés à l’étude du paranormal et peer-reviewed). Il y avait donc une littérature considérable à consulter au début des années ’80, de pratiquement un siècle. Cette littérature contenait bon nombre d’études de cas (pour la période métapsychique) et d’expériences de laboratoire (pour la période parapsychologique).

    Je me souviens être allé durant mes études universitaires en bibliothèque de philosophie et y avoir consulté l’œuvre intégrale de William James. Il y avait un tome consacré uniquement à ses publications dans le cadre de l’American Society for Psychical Research. Rien que dans ce volume-là, il y avait pas mal de choses à dire et à commenter. Bon, évidemment, ça c’était dans la bibliothèque de mon université: je ne sais pas ce qu’ils ont dans l’université d’Henri Broch. Mais mon petit doigt me dit qu’en cherchant un peu on devrait aussi y trouver ce genre de choses…

    A Nantes en 1985, René Peoc’h a défendu une thèse de doctorat sur la micro-psychokinèse (thèse dans laquelle il rapporte des résultats significatifs), intitulée Mise en évidence d’un effet psychophysique chez l’homme et le poussin, sur le tychoscope. Je n’ai pas vu un article scientifique d’Henri Broch passer proposant une réplication des résultats de Peoc’h ou une variante du même style (par ex. une réfutation de la méthodologie).

    Comme je le disais dans l’épisode, je suis bien conscient que l’information circule plus facilement aujourd’hui que dans les années ’80, merci à internet. Néanmoins, c’était un problème auquel devait faire face tous les scientifiques à l’époque, quelque soit leur domaine d’expertise.

    Dans n’importe quel autre domaine de la science, je suis certain que tu défendrais l’importance des publications scientifiques dans des revues à comité de lecture. La vraie question pour moi est: pourquoi faire une exception ici (que ce soit pour le paranormal ou pour l’enseignement de la pensée critique)? Pourquoi sur ces deux sujets-là, on peut s’abstenir de faire des publications scientifiques et être cependant considéré comme un expert par la communauté sceptique (qui devrait pourtant être plus rigoureuse que ça)?

    Cordialement,

  5. goulven Kerbellec #skeptboarder
    goulven Kerbellec #skeptboarder dit :

    Je défends l’importance des publications, et tes exemples illustrent a priori le « par contre » de ma phrase.
    Il y avait de quoi faire sur ces thèmes effectivement. Et si les tenants ont publié c’est qu’il y a moyen de publier.
    Broch publie et est expert dans son domaine (biomoléculaire) : http://webs.unice.fr/site/broch/travaux_HB.html
    Sur le reste on ne peut visiblement pas parler d’expert au sens recherche du terme dans un domaine où il n’a pas de publis.
    Ceci étant, la reconnaissance des biais fait parti de l’expertise de tout chercheur (normalement ^^ …), Broch s’est particulièrement entraîné et spécialisé la-dessus, ce qui lui donne une expertise dans la lecture critique d’article. Tant qu’il s’en tient à la mise en avant de biais qu’il documente bien, je le considère comme un expert (des biais), mais s’il s’aventure trop profond dans le domaine il risque effectivement des erreurs dues au fait qu’il n’est pas expert du domaine.

  6. admin
    admin dit :

    Bonsoir skeptboarder,

    « Broch publie et est expert dans son domaine (biomoléculaire) »

    Fair enough. On ne devient pas un professeur de physique sans publier des articles dans un domaine donné (ici biomoléculaire). Je n’en doutais pas. La question que je soulevais dans le podcast est bien évidemment les publications dans le domaine de l’étude scientifique du paranormal ou de l’enseignement de la pensée critique (les domaines directement concernés par la zététique). Ici il liste des publications style « Bienvenue », « Patriote Côte d’Azur », « Auto-Revue », « Sciences et pseudo-sciences » (etc.) pour ses publications sur le paranormal ou l’enseignement de la pensée critique. Ce ne sont pas des journaux scientifiques à comité de lecture.

    Une exception cependant: en parcourant la liste, il y a cependant celle-ci qui me semble sortir du lot et semble être un article dans une revue à comité de lecture. Elle date de 1985:

    « Une épée de Damoclès sur l’Education, la Science et la Culture » European Journal of Science Education, vol. 7, N° 4, p. 353-360

    Je pense donc qu’il faut que je la rajoute à ma liste des publications scientifiques de Broch. Merci! Cependant, d’après l’abstract que j’ai pu en trouver sur le net, il s’agit d’un texte qui présente son projet de la fondation de la zététique, donc encore une fois pas d’une recherche empirique…

    « Sur le reste on ne peut visiblement pas parler d’expert au sens recherche du terme dans un domaine où il n’a pas de publis. »

    On est d’accord.

    « Tant qu’il s’en tient à la mise en avant de biais qu’il documente bien, je le considère comme un expert (des biais), mais s’il s’aventure trop profond dans le domaine il risque effectivement des erreurs dues au fait qu’il n’est pas expert du domaine. »

    Je pense effectivement qu’il y a son domaine d’expertise scientifique (biomoléculaire) d’un côté et de l’autre son intérêt pour le paranormal et l’enseignement de la pensée critique. Son domaine d’expertise scientifique le rend évidemment plus compétent qu’un quidam tout venant, mais est-ce que cela le rend réellement un expert dans le débat sur la paranormal ou en pédagogie? C’est effectivement la question que l’on peut se poser.

    En fait pour moi la question n’est pas tellement celle de ses compétences (en tant que physicien, il doit clairement en avoir), mais l’usage qu’il en fait et (surtout) son degré d’engagement avec la littérature parapsychologique. Par exemple, il aurait certainement pu réaliser une tentative de réplication de l’expérience de René Peoc’h dont je parlais plus haut (ou un article présentant pourquoi cette expérience ne tient pas la route), mais il ne l’a pas fait. En 1994, Daryl J. Bem et Charles Honorton publient « Does psi exist? Replicable evidence for an anomalous process of information transfer » dans le Psychological Bulletin (une des meilleurs revues de psychologie), un article qui affirme avoir trouvé des résultats significatifs qui prouvent l’existence du psi, mais je ne vois pas Broch publier une réplication ou une contre-expertise de cet article-là.

    Ceci étant dit, il a fait partie du groupe qui a publié « Analyse de la thèse de Madame Elizabeth Teissier » sur le net (je ne pense pas que cela ait fait l’objet d’une publication ailleurs que sur la toile), mais la thèse de Teissier n’est pas de nature expérimentale…

    Cela vaut la peine de comparer avec la liste des publications d’un Richard Wiseman ou d’un Chris French en terme de nombres d’expériences sur le paranormal qu’ils ont réalisé et publié dans des revues scientifiques…

    Cordialement,

  7. Quentin
    Quentin dit :

    Je n’ai malheureusement pas encore eu le temps d’écouter le podcast (ce sera la semaine prochaine) mais je me permet de réagir aux commentaires.

    Il me semble que la démarche de Henri Broch comme celle de pas mal de « sceptiques » est avant tout citoyenne, pas académique. Il écrit un livre à suivre dans le but de sensibiliser le grand public à l’esprit critique. Un peu comme un Dawkins qui milite pour l’athéisme. Du coup je ne sais pas si on peut vraiment lui reprocher de ne rien avoir publié de sérieux dans ce domaine. Il faut le voir comme un militant, qui tient cette activité dans ses loisirs, en dehors de son vrai travail académique.

    Par ailleurs je ne suis pas certains que le scepticisme puisse vraiment être une discipline académique sous quelque forme que ce soit. S’il s’agit de défendre la méthode scientifique, c’est acquis a priori. Ca pourrait être plutôt une attitude philosophique envers la recherche, plutôt conservatrice, mais à mon avis il est important que les chercheurs de toutes les disciplines puissent avoir des attitudes diverses : que certains soient innovants et provocateurs, d’autres plus garde-fous. Donc je ne vois pas de raison de militer pour un tel conservatisme (sauf à considérer que la science soit sur une mauvaise pente ? Je n’ai pas cette impression).

    Concernant le domaine de la philosophie c’est un peu le même problème : je ne vois pas vraiment de place très clair pour un scepticisme scientifique comme position à proprement parler. A peu près tout le monde y défend l’usage de la raison et de l’argumentation (sauf peut être dans certaines branches obscures) ce serait enfoncer des portes ouvertes que de le faire. On peut défendre des positions plus prononcées, mais il s’agira de positions qui s’appliquent à des domaines particuliers (le physicalisme, l’athéisme, …) et qui ne font pas forcément consensus, du coup le militantisme à leur sujet auprès du grand public serait je trouve déplacé (c’est d’ailleurs un travers je trouve chez certains sceptiques, et on peut peut être faire ce reproche à Broch), ou bien si on veut trouver une position plus générale, ce sera une positon trop vague pour être vraiment intéressante philosopgiquement parlant, encore une fois plutôt une attitude qui ne mérite pas forcément d’être défendue si âprement.

    En résumé je ne vois pas vraiment d’autres places pour le scepticisme scientifique que celle de militantisme citoyen pour l’usage de la raison et de la méthode scientifique, c’est à dire pour apporter à la sphère publique ce qui fait ses preuves et fait consensus dans les milieux académiques.

  8. Quentin
    Quentin dit :

    Bon finalement j’aurais du écouter le podcast avant de commenter puisqu’il y a pas mal de choses qui y sont déjà évoquées… Les critiques de Broch me paraissent pertinentes, et en effet j’imagine qu’il puisse y avoir un deuxième type de scepticisme qui est l’application au paranormal ou aux domaines scientifiques un peu « limites ».

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